Avec la belle saison qui s’annonce, si vous prévoyez faire un séjour dans la Vieille Capitale, un arrêt chez les Hurons-Wendats s’impose pour y découvrir leur patrimoine architectural religieux. Située dans le Vieux-Wendake, l’église de Notre-Dame-de-Lorette charme rapidement par sa simplicité, sa sobriété et son authenticité. Elle témoigne de l’établissement, de l’histoire et de la ferveur religieuse des Hurons-Wendats.
Chassée de la région des Grands Lacs par les Iroquois, la nation huronne-wendate s’installe à Québec, d’abord près du fort Saint-Louis, puis à l’Anse-du-fort sur l’île d’Orléans avant d’arriver à Sainte-Foy, voisinant alors une chapelle missionnaire située sur l’actuel emplacement de l’Université Laval. Finalement, elle séjourne sur les rives de la rivière Saint-Charles à L’Ancienne-Lorette avant de se fixer définitivement à la Jeune-Lorette en 1697. La mission jésuite sur place marque la halte finale de leur longue chronique de déplacements.
Avec le soutien financier de Mgr de Saint-Vallier (1653-1727), le Peuple-Nation érige une première chapelle en bois qui servira au culte jusqu’à ce qu’elle soit remplacée par une construction en pierre en 1730.
Pour Linda Sioui, recherchiste à l’Hôtel-Musée Premières Nations, le site où s’élève l’église actuelle est imprégné d’une importance historique. « C’est quand même un des lieux les plus anciens. C’était le lieu de rassemblement pour les gens de la communauté à l’époque où ils sont venus s’installer ici. »
Le 10 juin 1862, la chapelle est la proie des flammes. « Le feu a pris dans la fabrique de papier de l’autre côté de la rue, dès que le feu a été transféré ici [l’église], les gens qui habitaient proche ont essayé de sauver l’église en priorité. D’ailleurs, le moulin à papier a complètement été rasé. Un choix a été fait ! Les objets les plus importants, le maître-autel, la lampe du sanctuaire, tout ce qui était vêtements liturgiques, vases sacrés, tout cela va être sorti de l’église », signale l’historienne wendate.

Partiellement détruite par l’incendie, l’église est reconstruite en 1865 sur les fondations et selon le modèle de l’ancienne. Toujours debout aujourd’hui, on y ajoute en 1904 une chapelle latérale appelée Jubé des Sœurs ainsi qu’une sacristie, parce qu’« on manquait un peu de place dans l’église ». Au fil des ans, celle-ci est entretenue et restaurée dans le respect de son style d’origine.
Depuis 1957, elle est classée monument historique par la Commission des monuments historiques du Québec. De plus, en 1981, elle est reconnue comme monument historique et architectural d’importance nationale par le ministère du Patrimoine canadien.

Outre le bâtiment, l’église renferme un véritable trésor composé d’une collection d’ornements liturgiques, d’objets de cultes, de sculptures, d’orfèvrerie et d’une partie du mobilier qui a survécu au feu. Citons, à titre d’exemple, le tabernacle du maître-autel, une pièce majeure qui daterait de 1722, attribué au maître sculpteur Noël Levasseur (1680-1740). Également, on y retrouve la lampe du sanctuaire en argent, œuvre de l’orfèvre François Ranvoyzé (1739-1819), ainsi qu’un chemin de croix exécuté en 1942 par le sculpteur sur bois de Saint-Jean-Port-Joli, Médard Bourgault (1897-1967). Dans la voûte sont conservés de nombreux objets liturgiques, dont une chasuble wendate en cuir blanc, brodée en poil d’original et perlée par une artisane de la communauté.
L’église, qui sert encore au culte, est imprégnée par sa culture autochtone, autant visuellement que spirituellement. « À la demande des gens, il peut y avoir des chants en langue wendate durant une cérémonie de mariage, un baptême ou des funérailles et, aussi, la purification avec les herbes sacrées », précise la jeune femme, elle-même baptisée dans cette église.
« Tout le monde nous dit qu’elle a un cachet particulier. Moi, j’ai déjà vu des groupes qui faisaient la tournée des églises du patrimoine religieux de Québec et qui disaient : celle-là n’est pas comme les autres. Elle a son cachet, à la fois son inspiration catholique européenne des années 1600 et 1700, mais il y a aussi du Wendat, aussi du moderne. »
L’église est accessible aux visiteurs tout au long de l’année. Il suffit de s’adresser à l’Hôtel-Musée Premières Nations. Sa visite est incorporée dans un forfait découverte qui se fait avec un guide (http://tourismewendake.ca/activites/activites-culturelles/musee-huron-wendat/). Une excellente façon d’en apprendre davantage sur ce lieu de culte et cette Première Nation à l’histoire aussi riche que sa culture.
Pour aller plus loin
- Denis Bouchard, Éric Cardinal et Ghislain Picard, De Kebec à Québec. Cinq siècles d’échanges entre nous, Montréal, Les Éditions des Intouchables, 2008, p. 197.
- Sarah-Michèle Couillard, journaliste et Jean Lortie, réalisation, « Église Notre-Dame-de-Lorette, à Wendake », ECDQ.TV, [En ligne : https://www.ecdq.tv/eglise-notre-dame-de-lorette-a-wendake/]
- René Gilbert, « La chapelle huronne de Lorette », dans Présence autochtone à Québec et Wendake, Québec, Les Éditions GID, 2010, p. 102-104.
- Pascal Huot, Entrevue avec Linda Sioui. Enregistrement sur support numérique, Wendake, 2011. Collection privée. Une première version a été publiée dans Ethnologue de Terrain, La Malbaie, Éditions Charlevoix, 2016, p. 143-146.
- Siham Jamaa, « Wendake », dans Sur les chemins spirituels et religieux du Québec, Guide de voyage Ulysse, 2016, p. 180-187.

Pascal Huot est chercheur indépendant. Diplômé en études autochtones, il a également effectué une maîtrise en ethnologie à l’Université Laval. Celle-ci a fait l’objet d’une publication intitulée Tourisme culturel sur les traces de Pierre Perrault, Étude ethnologique à l’Île aux Coudres. Ses résultats de recherche ont paru dans divers journaux, magazines et revues. En 2016, il a fait paraître Ethnologue de terrain aux Éditions Charlevoix.