Recension du livre : Daniel Clément, Les récits de notre terre. Les Atikamekw, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2018, 144 p. (Coll. « Tradition orale »).
par Pascal Huot
Cette nouvelle collection « Tradition orale » dirigée par Daniel Clément souhaite consigner et diffuser ce qui existe sous une forme non écrite : mythes, épopées, légendes, contes, fables et paroles, proverbes et dictons, chants et récits de vie. En somme, ce « qui constitue un véritable héritage commun pour toute l’humanité »! Il s’allie ainsi avec l’idée que « le célèbre spécialiste des Amérindiens, Franz Boas, affirmait au siècle dernier que les mythes et les histoires reflètent mieux la culture des peuples que les descriptions ethnographiques ».
Pour ouvrir cette aventure dans ce patrimoine immatériel, l’anthropologue Daniel Clément présente dans la première série de cette collection « Les Récits de notre terre », consacrée aux autochtones des deux Amériques, les Premières Nations du territoire élargi du Québec. Le premier arrêt se fait chez les Atikamekw, le peuple de l’écorce autrefois appelé « Têtes-de-boule », qui se retrouvent principalement dans la vallée de la rivière Saint-Maurice et regroupent trois communautés, celles de Manawan, de Wemotaci et d’Opitciwan.
Après un aperçu général de cette Première Nation, l’ouvrage déploie un corpus de cinquante-cinq récits divisés en huit rubriques provenant, pour la grande majorité, de témoignages consignés dans les années 1920-1930. Le florilège de récits et de mythes est substantiel, allant des histoires des origines, au Wisaketcakw se rapportant au personnage du Décepteur1, mais également au héros Tcikabis, sans oublier les cannibales Kokotce. On trouve ensuite les histoires relatives au bestiaire des Atikamekw, leurs relations avec d’autres nations et quelques récits divers. Le lecteur y découvre notamment l’origine du feu, pourquoi il est si facile de prendre un lièvre ou encore les tours joués au soleil par Tcikabis. Les récits abordent également la scapulomancie2, la cosmologie et les relations violentes entre les Atikamekw et les Iroquois.
Le premier opus est des plus prometteurs pour la pérennité de cette belle initiative ethnologique qui vise à faire connaître les conceptions vernaculaires des différentes Premières Nations du Québec.
Nota bene : Un second titre du même auteur – Les récits de notre terre: les Innus – est aussi paru dans cette collection en 2018.
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1. Décepteur : « La section Wisaketcakw se rapporte au personnage du Décepteur ou Trickster, une figure proéminente dans les représentations narratives des peuples amérindiens. On lui attribue aussi parfois la création de certains traits du paysage et des êtres. » (Clément 2018, p. 5) Le Décepteur est un personnage trompeur, traître et joueur de tours.
2. La scapulomancie est la divination par l’interprétation des craquelures d’omoplates soumises à la chaleur du feu.

Pascal Huot est chercheur indépendant. Diplômé en études autochtones, il a également effectué une maîtrise en ethnologie à l’Université Laval. Celle-ci a fait l’objet d’une publication intitulée Tourisme culturel sur les traces de Pierre Perrault, Étude ethnologique à l’Île aux Coudres. Ses résultats de recherche ont paru dans divers journaux, magazines et revues. En 2016, il a fait paraître Ethnologue de terrain aux Éditions Charlevoix.