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Wactenamakanicic e opikihakaniwitc : L’adoption coutumière chez les Atikamekw Nehirowisiwok de Manawan

Image en bandeau : Lire en nature | Photo : Ben White/Unsplash

Recension du livre : Waseskinokwe Eva Ottawa, Wactenamakanicic e opikihakaniwitc : L’adoption coutumière chez les Atikamekw Nehirowisiwok de Manawan, Presses de l’Université Laval, Collection « Mondes autochtones », 2023, 126 pages

En matière d’adoption, la coutume autochtone est officiellement reconnue au Québec depuis le 16 juin 2018 au sein du Code civil. Cette reconnaissance ne signifie pas pour autant que la voie est toute tracée. Waseskinokwe Eva Ottawa appartient à la nation Atikamekw Nehirowisiwok de Manawan. Elle a fait ses études en droit. Ce livre est le résultat de ses recherches de maîtrise à l’Université d’Ottawa. Elle vise non seulement à faire reconnaître les modalités de l’adoption coutumière atikamekw nehirowisiwok dans le système juridique québécois, mais à l’ancrer dans une pleine égalité législative.

La démarche de l’auteure se trouve originale sous de multiples aspects. D’abord, son côté très immersif et personnel, une approche « ancrée et réflexive » (p. 9), puisqu’elle s’intéresse à sa propre communauté dont elle a même été nommée la grande cheffe de 2006 à 2013. L’utilisation de la langue de sa communauté est également importante. Les termes utilisés permettent de se faire comprendre par ses pairs, que ce soit les Atikamekw Nehirowisiwok qui participent à sa recherche, mais également les allochtones, universitaires et juristes, qui devront saisir les résultats de son analyse. Le défi de traduction prend donc toute son importance. Enfin, la méthodologie choisie innove, dans le sens où elle « repose sur l’examen des interactions entre ce régime juridique inédit et le droit canadien et le droit québécois. C’est un choix radicalement différent » (L’Hon. Renée Dupuis, C.M., Ad.E. p, XI).

La première partie du livre explique le contexte de sa communauté, les notions comme le pluralisme juridique, ainsi que la méthodologie de sa recherche empruntant à l’interdisciplinarité. Bien qu’étudiante en droit, elle utilise et analyse des données ethnologiques. Elle va à la source, au sein de sa communauté, afin de recueillir des témoignages d’autant d’acteurs impliqués dans les adoptions. Celles-ci sont représentées au sein de onze schémas narratifs constituant la deuxième partie. La troisième et dernière partie présente l’analyse approfondie de ces sources en complétant le cadre descriptif de l’adoption chez les Atikamekw Nehirowisiwok en détaillant : Kokominook-Kimocominook – les valeurs; Ka motewkaniok – les principes; Ka nanakatcitakaniok – les règles; ka waskapitcik – les acteurs; ka nosnetakaniok – les processus. Enfin, les annexes appuient la démarche rigoureuse empruntée par l’auteur. On y retrouve le tableau des participants, le processus d’analyse des données ainsi que le glossaire des termes et des expressions utilisés en atikamekw nehiromowin et leur traduction française.

L’ensemble permet de comprendre que l’enfant se situe au centre du processus chez les Atikamekw Nehirowisiwok et qu’il peut parfois même choisir ses parents adoptifs. Les adultes qui obtiennent ou donnent la garde d’un enfant doivent s’engager vers son autonomie. Ils doivent lui expliquer les motifs de son adoption dès qu’il est en âge de comprendre. Se soustraire à cette règle peut amener des difficultés. De leur côté, les grands-parents s’impliquent dans le processus en ayant toujours à cœur le bien-être de l’enfant. Ils peuvent faire des recommandations qui seront suivies dans un grand respect.

Enfin, Eva Ottawa présente une démarche qui intègre l’adoption coutumière des Atikamekw Nehirowisiwok au sein du système juridique et elle codifie les sources de ce droit. En espérant que cette publication inspire d’autres communautés autochtones qui voudront faire reconnaître leur droit coutumier en matière d’adoption et de tutelle.

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